Les silences entre deux cafés

Il y a des rencontres silencieuses qui disent plus que mille paroles.

Pauline retrouvait chaque matin, sans vraiment le choisir, Laurent au même café du quartier latin. Sans jamais échanger un mot au début, ils partageaient cet espace comme deux habitués invisibles.

Le matin, la lumière filtrée illuminait les grains de café et les pages ouvertes. Laurent lisait, Pauline écrivait. Un jour, le miroir du café refléta leurs regards croisés, et tout changea sans qu'ils sachent vraiment comment.

Ce n'était pas une histoire d'amour flamboyante, ni un coup de foudre. C'était un jeu délicat de gestes retenus, de sourires à peine esquissés, de tasses posées doucement sur la table. Le silence lui-même devenait complice.

Mais ce lien fragile se heurta à une absence : Laurent devait partir en voyage pour plusieurs mois, un projet dont il ne voulait rien dire, gardant une distance protectrice.

Pauline sentit ce vide s'installer, un écho sourd dans la routine désormais orpheline. Leur rendez-vous muet avait donné naissance à une habitude qu'elle n'était pas prête à perdre.

Un matin, Laurent laissa sur la table un petit carnet, sans explication. Pauline ouvrit les pages : des poèmes, des dessins, un reflet de leurs silences partagés.

Ce cadeau fut un dernier pont jeté entre eux, une parole donnée à ce qui ne pouvait être dit autrement.

Le café retrouva son calme ordinaire, mais Pauline sut que ces silences avaient changé quelque chose en elle, une manière nouvelle de voir les liens, l'absence et la présence.

Elle ne chercha pas à comprendre ni à prolonger. Parfois, la beauté réside dans ce qui s’efface doucement, dans ce contact suspendu entre deux vies. Et c’était suffisant.

Les regards, les gestes, les silences, tout cela racontait une histoire que seules leurs âmes, peut-être, pouvaient entendre.