Les silences échangés d’un amour interrompu

Je n'avais jamais imaginé que le doux éclat d’un après-midi d’automne à Bordeaux puisse cristalliser un éclat de ce que j’appelle aujourd’hui l’inachevé.

Julien, écrivain en panne d’inspiration, errait le long des quais, cherchant plus la solitude que la compagnie. C’est là, assise sur un banc, que je l’ai aperçu pour la première fois, Lydia, une violoncelliste au regard perdu, jouant de son instrument sans musique, simplement pour elle.

Les mots sont restés suspendus entre nous, remplacés par un échange de regards et la musique qui semblait tisser une toile invisible. Peu à peu, nous avons tressé des marches furtives, des après-midis volés au temps, accompagnés de silences plus éloquents que les phrases.

Mais la fragilité de ce lien résidait dans ses non-dits. Lydia portait un passé lourd, une liaison passée à laquelle elle ne voulut jamais vraiment tourner le dos. Julien, lui, s’accrochait à ses blessures d’enfance, mettant sans cesse une barrière entre lui et ce qui semblait trop beau pour durer.

Un soir, brisés par l’incompréhension, nos chemins se sont écartés, sans éclat, juste comme un souffle qui se dissipe dans le vent tiède. Pourtant, en dépit de l’absence, je sens parfois son écho, un frisson d’émotion suspendu dans l’air, un non-dit qui refuse de disparaître.

Il n’y a pas eu de fin dramatique ni de retrouvailles émouvantes. Juste un espace où l’on apprend que certains amours ne se mesurent pas à leur durée, mais à la trace indélébile laissée dans le silence partagé.

Aujourd’hui, en reprenant ce carnet, j’écris ces lignes pour garder intact ce fragment d’un temps suspendu, car parfois aimer, c’est aussi savoir laisser partir sans chercher à retenir.